Jeudi 3 aout-21H00

Jeudi 03 Août 2023

21h

« Mantra »

de

Stockhausen

Auditorium Joseph Cosma

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Programme

Karlheinz Stockhausen

Mantra

Jean-François Heisser piano

Jean-Frédéric Neuburger piano

Serge Lemouton informatique musicale

BIOGRAPHIES

Karlheinz Stockhausen

« Je dirais que Mantra est une sorte de galaxie en miniature. Au moment où je la composais, je ne sentais rien, je ne pensais à rien d’autre. Je n’avais qu’une idée en tête : réaliser ce que le Mantra exigeait de moi. Il se construisait à travers moi, et je me disais parfois que j’étais en train de réaliser une peinture assez juste de ce qu’est le cosmos » (Karlheinz Stockhausen)

 

En 1970, une manière de révolution s’opérait dans le milieu musical, dont Mantra est à la fois l’origine et le témoin catalyseur : 2 pianos (non préparés), munis de quelques percussions légères (wood-blocks et crotales), augmentés par un dispositif électro-acoustique dont l’une des fonctions est de transformer en temps réel le son naturel des cordes, une série musicale de 13 notes, un procédé répétitif qui relie la culture hindouiste à celle de l’Occident… Nous voilà à la frontière de la musique sérielle (dont la structure s’élabore à partir de séries, mais ici la série est unique), de la musique répétitive (chère à Steve Reich ou Philip Glass), du happening pur et simple où l’œuvre se crée dans l’instant (Mantra est pourtant une œuvre écrite, mais elle laisse une marge de manœuvre à la liberté du geste), et nous voilà dans un univers où la notion même de temps se dissout, s’abolit.

Une seule et même série – composée de 13 notes – sert de base, de réservoir, à l’œuvre entière. La définition qu’en donne Ivanka Stoïanova (dans son livre Karlheinz Stockhausen – Je suis les sons…, publié en 2014) me parait résumer parfaitement le propos : « La formule n’est absolument pas un matériau thématique figé qui participe au tissu symphonique narratif, mais une sorte de code génétique à possibilités illimitées qui produit des processus pluridimensionnels et spatiaux ». Le mot « code génétique » explique à lui seul tout le processus compositionnel de Mantra : de ce code surgira une arche musicale structurée en 13 événements, se déployant de répétitions en transformations jusqu’à plonger l’auditoire en état d’hypnose, à l’extraire en tout cas des paramètres terrestres. L’écrin électro-acoustique, œuvrant tantôt par inserts, tantôt par couches additionnelles, participe également à cet étirement du temps, à cette fenêtre ouverte sur l’intime d’un espace démesuré.

Il faut une disponibilité d’écoute totale pour accueillir Mantra. On n’apprivoise pas une telle œuvre, c’est elle qui vous envahit et vous pénètre : « j’ai eu l’idée d’une seule figure ou formule musicale qui allait se déployer sur une très longue période de temps… » (Karlheinz Stockhausen)

Jean-François Heisser et Jean-Frédéric Neuburger ont beaucoup joué cette œuvre, toujours en compagnie de Serge Lemouton. Comme un aboutissement logique de ce (long) parcours commun, ces 3 musiciens ont enregistré Mantra, chez le label MIRARE, en 2020.

Jean-Noël Ferrel

Karlheinz Stockhausen en octobre 1970

(lors des répétitions de Mantra)

Jean-François Heisser

 » Artiste complet « , l’expression prend tout son sens avec Jean-François Heisser, pianiste, chef d’orchestre, pédagogue à la vaste culture et à la curiosité sans cesse en éveil.

Né à Saint-Etienne, il est l’héritier de Vlado Perlemuter, Henriette Puig-Roget et Maria Curcio. Il a lui-même enseigné le piano de 1991 à 2016 au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris. Parmi ses disciples, on peut citer Bertrand Chamayou et Jean-Frédéric Neuburger avec lesquels il entretient une relation de grande complicité musicale.

Son activité est aujourd’hui partagée entre une carrière de soliste, de directeur musical de l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine (ex Orchestre Poitou-Charentes) depuis 2001, de chef invité, et aussi de directeur artistique pour différentes structures et programmations de premier plan.

Sa discographie compte plus de 40 enregistrements : après le grand succès des œuvres de Paul Dukas (Diapason d’Or de l’année), il collabore avec Erato (Coffret de 6 CD consacrés au répertoire espagnol, Schumann, Brahms, Saint-Saëns, Debussy, etc…), puis Naïve (Beethoven, Brahms) et Praga Records (Weber, Berg, Manoury, Bartok…). Il enregistre aujourd’hui essentiellement pour Mirare avec l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine (Falla, Wien 1925, Dubois, American Journey) et les Musicales Actes Sud (Albéniz, Mompou). Sont dernièrement parus : l’Intégrale des Concertos pour piano de Beethoven (Mirare, fin 2017) et sa transcription pour 2 pianos de La Symphonie Fantastique d’Hector Berlioz (avec Marie-Josèphe Jude – Harmonia Mundi, début 2019). Vient de paraître chez ERATO/WARNER un coffret consacré à des rééditions de ses enregistrements du répertoire espagnol.

Soliste, il joue sous la direction des plus grands chefs tels que Janowski, Tilson-Thomas, Segerstam, Krivine, Mehta, Plasson, Roth, etc.. avec, entre autres, le London Symphony Orchestra, l’Orchestre Philharmonique de Radio-France, le Royal Philharmonic Orchestra, l’Orchestre de Paris, le Bayerischer Rundfunk, l’Orchestre National de France, Les Siècles… Il se produit beaucoup en récital avec une prédilection pour Beethoven (Sonates, Variations Diabelli, etc…), Brahms, Chopin, le répertoire espagnol (Albéniz, Falla, Granados, Mompou), et bien sûr les grands compositeurs français d’hier et aujourd’hui. Outre les grands concertos et les pièces majeures du répertoire pianistique, il a beaucoup défendu les œuvres du XXème siècle et la création contemporaine.

Son exigence d’interprète le conduit à jouer régulièrement sur pianos historiques (Weber : Les quatre Sonates – Praga Records, Konzertstück – Mirare). Avec le chef François-Xavier Roth et son orchestre « Les Siècles », il alterne claviers modernes (les trois Concertos de Bartók) et instruments d’époque (Saint-Saëns et Brahms). Il entreprend sur la saison 2019/20 une tournée nationale sur pianos anciens et particulièrement un Chickering historique de toute beauté.

Chambriste, Jean-François Heisser a bien évidemment parcouru tout le répertoire avec des partenaires tels que les Quatuors Ysaye, Lindsay et Pražák. Si son enregistrement des sonates de Bartok avec Peter Csaba (Praga) demeure aujourd’hui incontournable, il a aussi beaucoup défendu le répertoire à 4 mains et 2 pianos. Il reste un des partenaires les plus demandés tant par des artistes confirmés que par la jeune génération.

Directeur musical, il développe depuis 2001 le projet de l’Orchestre de Chambre Nouvelle-Aquitaine qu’il a hissé au plus haut niveau des formations de chambre françaises, ainsi qu’en attestent les enregistrements réalisés pour le label Mirare : la version primitive de L’Amour Sorcier de Falla et le Kammerkonzerte de Berg, salués unanimement par la presse, sont désormais des références. Fin 2017, est parue l’intégrale des Concertos pour piano de Beethoven (Jean-François Heisser piano et direction), fruit d’un long travail et d’une longue maturation avec les musiciens de l’orchestre.

Directeur artistique, sa complicité avec les Editions Actes-Sud l’a conduit à assurer la programmation des Soirées Musicales d’Arles. A partir de 2015, il est conseiller artistique du Festival de l’Orangerie de Sceaux. Enfin, pour perpétuer l’œuvre et le souvenir de son maître Vlado Perlemuter, interprète « historique » des grands compositeurs français, Jean-François Heisser est Président de l’Académie internationale Maurice Ravel, haut lieu de formation de jeunes talents. Il préside également le Festival Ravel en Nouvelle-Aquitaine depuis Août 2017.

Jean-Frédéric Neuburger (©Carole Bellaiche)

Né en 1986 à Paris, Jean-Frédéric Neuburger étudie l’orgue, le piano et la composition avant d’intégrer à 13 ans le Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris, d’où il ressort en 2005 muni de cinq 1er Prix. Il se perfectionne par la suite à Genève auprès de Michael Jarrell et Pascal Dusapin pour la composition. Depuis lors, il a une double activité de compositeur et de pianiste reconnu pour l’extrême variété de son répertoire.

Jean-Frédéric Neuburger reçoit de nombreuses commandes, notamment du Boston Symphony Orchestra, du Festival d’Evian, de Radio-France, du Concours International Long-Thibaud, des Folles Journées de Nantes. Les premières dates de son catalogue sont Sinfonia, pour deux pianos et percussions (2010), suivi de Souffle sur les cendres, pour violoncelle et piano. En 2012, sa Cantate profane sur deux poèmes d’Aimé Césaire, commande de Radio-France, est créée par le Chœur et l’Orchestre Philharmonique de Radio-France sous la direction de Pascal Rophé. Aux Etats-Unis, Christoph von Dohnányi dirige en 2015 la création de Aube, avec le Boston Symphony puis l’Orchestre de Paris.

Ses œuvres de musique de chambre ont été jouées par Henri Demarquette, François Salque, Nicolas Dautricourt, Lise Berthaud, Raphaël Sévère, Bertrand Chamayou, en des lieux tels que le Lincoln Center, Lucerne Festival, Musikverein Vienna…

Il se produit en soliste avec les orchestres les plus prestigieux (New York Philharmonic, San Francisco Symphony, Philadelphia Orchestra, NHK Symphony, Orchestre Philharmonique de Radio-France, Orchestre de Paris, Orchestre du Capitole de Toulouse…) et collabore avec des chefs renommés comme François-Xavier Roth, Paavo Jarvi, David Zinman, Jonathan Nott, Michael Tilson Thomas… Il a aussi travaillé avec Pierre Boulez notamment pour étudier sa 2ème Sonate pour piano. En janvier 2014, l’Auditorium du Louvre lui a offert une carte blanche de six concerts.

Il est invité par les plus grands festivals internationaux (Verbier, Lucerne, Klavier-Festival Ruhr, La Roque d’Anthéron, Saratoga, La Jolla Music Society) et en tant que chambriste, il se produit avec les plus brillants musiciens de sa génération, comme le Quatuor Modigliani, Bertrand Chamayou, Renaud Capuçon, Raphaël Sévère…

Sa saison 2018/2019 comprend notamment une tournée en Asie avec l’Orchestre de la Suisse Romande et Jonathan Nott, des concerts avec le Concerto de Schumann et la création de sa nouvelle pièce pour orchestre Faits et gestes, avec François-Xavier Roth et le Gürzenich-Orchester de Cologne, ainsi qu’un récital pour le week-end d’ouverture de La Scala à Paris.

Récemment, on a pu l’entendre au Brésil et au Festival Musica de Strasbourg avec Jean-François Heisser dans Mantra de Stockhausen, à Boston avec Christoph von Dohnányi pour le Concerto pour piano de Schumann, ainsi qu’au Lincoln Center de New York pour la première aux Etats-Unis de sa pièce Plein Ciel. En février 2018, il a donné la première (encensée par la critique) de son propre concerto pour piano avec l’Orchestre Philharmonique de Radio-France et Jonathan Stockhammer. Il a également joué à la Philharmonie de Berlin, à la Philharmonie de Paris et au Lucerne Festival avec un programme d’œuvres de Rihm et Schumann, ainsi que la première d’Alavo de Vito Zuraj avec les musiciens de la Berlin Philharmonic Academy.

Il consacre une partie importante de son activité d’interprète à la diffusion de la musique d’aujourd’hui : il crée en 2012 le Concerto pour piano de Philippe Manoury avec l’Orchestre de Paris dirigé par Ingo Metzmacher ainsi que des œuvres de Bruno Mantovani, Phillip Maintz, Yves Chauris.

Ses disques ont été salués par la presse internationale. Le « Live at Suntory Hall », paru en 2008, obtint un « Choc » du Monde de la Musique, et son enregistrement des concertos pour piano de Ferdinand Herold a reçu un « Choc » de Classica.

Jean-Frédéric Neuburger reçoit le Prix Lili et Nadia Boulanger de l’Académie des Beaux-Arts et le Prix Hervé Dugardin de la Sacem 2015.

Il est nominé en 2019 comme compositeur de l’année aux Victoires de la musique classique.

Sa musique est publiée par Durand / Universal Music Classical.

Serge Lemouton

Après des études de violon, de musicologie, d’écriture et de composition, Serge Lemouton se spécialise dans les différents domaines de l’informatique musicale au département Sonvs du CNSM de Lyon. Depuis 1992, il est réalisateur en informatique musicale à l’Ircam. Il collabore avec les chercheurs au développement d’outils informatiques, et participe à la réalisation des projets musicaux de compositeurs tels que Florence Baschet, Laurent Cuniot, Michael Jarrell, Jacques Lenot, Jean-Luc Hervé, Michaël Levinas, Magnus Lindberg, Tristan Murail, Marco Stroppa, Fréderic Durieux et autres.

Il a notamment assuré la réalisation et l’interprétation en temps réel de plusieurs œuvres de Philippe Manoury, dont K…, La frontière, On-Iron, Partita 1 et 2, et l’opéra Quartett de Luca Francesconi.

Une partie de ses recherches actuelles se situent dans le domaine de la transmission et de la préservation des œuvres du répertoire de l’informatique musicale.

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